Sondage sur le regard des Français sur l’ascenseur social

AUTEUR DE LA PUBLICATION

Pour notre étude sur le déterminisme social, nous avons souhaité sonder la population française sur l’ascenseur social. Dans un sondage IFOP pour l’Institut Sapiens et l’Institut Télémaque, nous avons interrogé un échantillon représentatif de la société française afin de recueillir leur pronostic sur le niveau de vie la prochaine génération et la confiance accordée aux différentes institutions pour améliorer le fonctionnement de l’ascenseur social.

Deux enseignements généraux peuvent être tirés de ce sondage. Tout d’abord, le pessimisme français, qui est une réalité, est avant tout une affaire de génération et dépasse les considérations socio-économiques. Ensuite, les solutions ont bien plus de chance d’émerger du corps social que de l’État. Si la jeune génération est de loin la moins pessimiste, toutes s’accordent à dire que le salut viendra de la société civile elle-même.

Le pronostic sur le niveau de vie de la prochaine génération comparé à la sienne

Question : Selon vous, vos enfants (ou vos neveux ou nièces si vous n’avez pas d’enfants) vivront-ils dans des conditions sociales meilleures, moins bonnes ou équivalentes aux vôtres lorsqu’ils auront votre âge ?

Le manque d’optimisme des personnes interrogées est particulièrement frappant. 89% des Français estiment que leurs enfants ne vivront pas dans de meilleures conditions qu’eux – dont 69% pensent que leurs enfants vivront dans des conditions sociales moins bonnes que les leurs et 20% dans des conditions équivalentes.

Ce manque d’optimisme est encore plus répandu chez les électeurs de la droite : 93% des sondés proches du parti des Républicains et 90% des interrogés proches du Rassemblent National pensent que leurs enfants vivront dans des conditions « moins bonnes » ou « équivalentes » aux leurs. Pour les proches du Rassemblement National, le chiffre s’élève à 81%. La République en Marche semble être le parti dont les sympathisants sont les plus optimistes puisque « seulement » 55% pensent que leurs enfants vivront dans des conditions moins désirables que les leurs.

Autre point important à relever, les 18-24 ans semblent beaucoup moins pessimistes que les générations supérieures, sans que l’on puisse néanmoins parler d’optimisme béat. En effet, seulement 39% des 18-24 ans ont une vision pessimiste de l’avenir, contre 61% pour les 25-34 ans, 68% pour les 35-49 ans, 79% pour les 50-64 ans et 76% pour les 65 ans et plus. Parmi les 18-24 ans, 33% pensent que leurs enfants vivront dans des conditions équivalentes aux leurs, et 28% dans de meilleures conditions, contre 18%, 8%, 11%, 6% et 7% pour les générations supérieures dans l’ordre croissant.

On remarque qu’il ne semble pas y avoir de différence de perception significative entre les différentes catégories socio-professionnelles. Contre intuitivement, les catégories supérieures semblent être plus pessimistes que les professions intermédiaires, les catégories populaires ou les inactifs : elles ont répondu « moins bonnes » à 73%.

Concernant le niveau d’éducation, les titulaires d’un CAP ou BEP sont moins optimistes sur l’avenir que la moyenne : 83% ont répondu que leurs enfants vivront dans de moins bonnes conditions et seulement 5% ont répondu dans de « meilleures conditions ». Les diplômés du supérieur répondent à 60% que leurs enfants vivront dans de moins bonnes conditions qu’eux. Néanmoins, il n’y a pas de corrélation entre le niveau de diplôme et l’espoir en l’avenir. En effet, les personnes interrogées ne disposant pas de diplôme ou uniquement d’un CEP ou BEPC, si elles sont moins qualifiées que les titulaires d’un CAP / BEP,  ne sont visiblement pas plus pessimistes pour autant : 67% ont répondu que leurs enfants vivront dans de « moins bonnes » conditions qu’eux et 12% dans de « meilleures conditions ». On retrouve les mêmes résultats pour le niveau de diplôme baccalauréat et le niveau bac + 2 (à ceci près que que 13% des bac +2 considèrent que leurs enfants vivront dans de meilleures conditions qu’eux).

De manière générale, c’est donc le pessimisme qui règne au sein de la société française, même si la plus jeune génération (18-24 ans) semble clairement se détacher du reste de la population. Étonnamment, c’est donc davantage un phénomène générationnel que socio-économique.

 

La confiance accordée à différentes institutions pour faire fonctionner l’ascenseur social

Question : Pour chacun des acteurs ou groupes suivants, diriez-vous que vous lui faites confiance ou pas confiance pour améliorer le fonctionnement de « l’ascenseur social » en France ?

60% des interrogés ont répondu avoir confiance en l’école pour favoriser l’ascenseur social. 59% sont prêts à accorder leur confiance aux associations, 54% aux Français, 47% aux entreprises et seulement 25% à l’État et les pouvoirs publics. Il existe une forte défiance de la part des Français vis-à-vis de la politique pour réparer l’ascenseur social. On remarque d’ailleurs que les catégories « populaires » ont encore moins confiance en l’État que les catégories « supérieures » (19% contre 28%).

Ces résultats témoignent d’une volonté de la part de la société civile de se prendre en main et de ne plus attendre de l’État ce qu’elle pourrait réaliser elle-même, injonction qui peut néanmoins paraître contradictoire : comment se fait-il que l’institution en laquelle les personnes interrogées ont le plus confiance est l’école et celle en laquelle ils ont le moins confiance est l’État ? L’école n’est-elle pas monopole de l’État ? Afin de bien interpréter ce résultat, il est nécessaire d’opérer une distinction entre, d’une part, le rôle que remplit l’école, l’institution sociale indispensable qu’elle représente et tous les acteurs du quotidien qui la font vivre (les enseignants, directeurs d’établissement, etc.) et, d’autre part sa politisation. L’école pourrait ainsi faire partie de la société civile si on ne la percevait plus comme un instrument politique mais comme une institution où se rencontrent librement élèves, parents et enseignants pour travailler dans le sens de l’intérêt de chacun. Ce diagnostic réaffirme la nécessité de s’appuyer sur la société civile et sur une école plus autonome plutôt que sur un État centralisateur.

 

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