Transition énergétique et métaux critiques : escalader l’Everest en tongs

AUTEUR DE LA PUBLICATION

Alessandro Giraudo

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Enseigne dans une Grande École à Paris ; pendant une quarantaine d’années s’est occupé de matières premières et a publié une vingtaine de livres sur le sujet.

Alessandro Giraudo

Le monde s’est engagé dans une transition énergétique historique dont le but fondamental est de réduire les émissions de gaz à effet de serre principal responsable du réchauffement climatique. Le choix s’avère à la fois politique, économique et stratégique. Bien que cruciale pour notre avenir, cette transition doit être abordée calmement et non brutalement sous la pression des faits.

La transition énergétique aura un impact particulièrement important sur le monde des matières premières avec toutes les répercussions économiques et géopolitiques qui en découlent. Elle suppose une disponibilité abondante et continue des métaux de base (cuivre, nickel, fer, aluminium), des métaux stratégiques (cobalt, lithium), des terres rares et de certains matériaux assez peu connus comme le graphite. Rappelons qu’une voiture électrique contient en moyenne 80 kg de cuivre contre 30-35 kg pour une voiture thermique. Mais c’est surtout sans compter avec l’extension du réseau électrique qui réclamera dans l’avenir des quantités considérables de cuivre et surtout d’aluminium pour les lignes à haute tension. Ces dernières utilisent l’ACSR (Aluminium-Conductor Steel Reinforced Cable) dont la conductivité est seulement 62% de celle du cuivre mais le poids est de 30% celui du cuivre à volume égal. A conductivité égale, un conducteur en aluminium pèse donc environ la moitié de son équivalent en cuivre, tandis que le prix du cuivre est 3.78 fois supérieur à celui de l’aluminium et ce à un prix quatre fois inférieur (8503 $/tonne pour le cuivre contre 2245 $/ tonne pour l’aluminium). En revanche, la production de l’aluminium est très énergivore : pour obtenir une tonne d’aluminium, il faut traiter 4-5 tonnes de bauxite avec un coût énergétique représentant environ la moitié du prix final de l’aluminium

D’ici 2040, on anticipe un doublement de la longueur du réseau électrique mondial qui devrait passer de 80 millions de km à 170 millions de km. Une extension correspondant à un investissement de 600 milliards de US$/an au cours des six prochaines années.

Les batteries des voitures et le stockage de l’énergie en général nécessitent du lithium, du sodium, du plomb et du cobalt. De son côté la fabrication des éoliennes nécessite beaucoup d’acier et de béton armé pour les socles et les mâts, des polymères (dérivés du pétrole) ou éventuellement du graphène pour les pales, du cuivre, du néodyme et du dysprosium. Selon les technologies, l’ensemble du système électrique requiert entre 80 et 650 kg/MW.

Actuellement, l’approvisionnement de ces métaux (stratégiques et de base) est stable. Toutefois des tensions liées à des problèmes logistiques mais aussi à la guerre Russo-Ukrainienne ont été observées au cours des dernières années. Elles ont induit des perturbations sur les marchés et les flux de certains métaux comme le titane dont la Russie et l’Ukraine sont respectivement les 4ème et 6ème producteurs mondiaux (un avion contient entre 20% et 40% de titane en fonction de son utilisation commerciale ou militaire) mais aussi de produits chimiques comme le néon et le CO2. La saga du néon est un cas d’école : les principaux gaz nobles sont extraits de l’atmosphère par les grandes usines sidérurgiques qui les cèdent ensuite comme sous-produit aux entreprises spécialisées dans le traitement et la distribution de gaz industriels. L’Ukraine est un grand pays sidérurgique. La destruction de certains complexes industriels (Azovstal à Mariupol, par exemple) a ainsi asséché l’offre mondiale de néon. Par effet-domino, les grands producteurs de semi-conducteurs (surtout localisés en Asie) utilisant des lasers au néon pour dessiner les circuits intégrés ont été fortement affectés. Et que dire des producteurs de boissons gazeuses subissant des problèmes de disponibilité de CO2, sous-produit des engrais azotés principalement fabriqués à partir de méthane. L’explosion du prix du gaz naturel en Europe a ainsi forcé les fabricants d’engrais à réduire leurs productions et donc à limiter l’offre de CO2 A leur tour les fabricants de boisson ont dû bloquer temporairement les chaînes d’embouteillage.

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