Le modèle d’innovation français est-il obsolète ?

AUTEUR DE LA PUBLICATION

Erwann Tison

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Erwann Tison est le directeur des études de l’Institut Sapiens. Macro-économiste de formation et diplômé de la faculté des sciences économiques et de gestion de Strasbourg, il intervient régulièrement dans les médias pour commenter les actualités liées au marché du travail, aux questions de formation et aux problématiques européennes. Il est également chargé de cours à la faculté d'économie de l'Université de Strasbourg. Il codirige également les observatoires "santé et innovation" et "emplois, formation et compétences" de l'Institut Sapiens. Il a publié « les robots, mon emploi et moi » (2019) et « un robot dans ma voiture » (2020) aux éditions ESKA.

Erwann Tison

En 2019, selon l’indice mondial de l’innovation, la France n’est que le 16e pays le plus innovant au monde et seulement 9e au niveau européen. Pour Yann-Maël Larher, expert de l’Institut Sapiens, le pays est handicapé par la lourdeur de ses institutions. Face à la concurrence du numérique, il est urgent de réinventer le modèle dépassé de l’innovation française.

Handicapé notamment par la lourdeur de ses institutions, notre pays souffre du cloisonnement des disciplines et d’une surreprésentation des sciences dites dures au détriment des sciences humaines et sociales. Malgré d’importants investissements en R & D la France n’est que le 16e pays le plus innovant au monde et seulement 9e au niveau européen ( Indice mondial de l’innovation 2019 ). Face aux enjeux posés par une transition numérique sous contrainte économique, environnementale et sociale, il est urgent de libérer tout le potentiel de la recherche en France.

Essentielle pour assurer la compétitivité du pays des lumières dans une économie globalisée, l’innovation est pourtant trop souvent restreinte à l’aspect technologique. Après la Seconde Guerre mondiale, les grandes sociétés françaises ont commencé à institutionnaliser leurs systèmes d’innovation, en créant des centres de R & D et en normalisant les processus opérationnels pour élaborer des produits commercialisables.

On se rend compte aujourd’hui que ce système n’est plus adapté au marché : il est trop consommateur de ressources, pas assez souple, trop centralisé et surtout trop tourné vers la technique. 55 % des chercheurs en entreprise sont ainsi issus d’une école d’ingénieurs et seulement 12 % sont titulaires d’un doctorat, quant aux sciences humaines elles n’ont souvent aucun représentant. Or pour reprendre les mots de Frédérique Vidal : « Un docteur n’est pas juste un savant, c’est aussi et peut-être avant tout un talent qui sait réagir et construire avec méthode face à l’inconnu. Les docteurs sont la force scientifique de notre pays, et c’est une force opérationnelle, qui a vocation à irriguer toute la société pour mieux la transformer. »

Réorganisation nécessaire

Avec le développement des technologies de l’information et des biotechnologies, il apparaît de plus en plus clair que le monde évolue vers une société de l’information et de la connaissance. On ne peut pas continuer à innover de la même façon qu’avant. Les processus rigides étouffent la créativité et réduisent l’agilité. Le numérique décloisonne les sphères personnelles et professionnelles, il atomise les frontières entre l’entreprise et la recherche mais aussi entre les disciplines.

Alors que  l’Europe a pris du retard dans la plupart des secteurs technologiques en comparaison aux Etats-Unis ou à la Chine, la variété des travaux de recherche en France pourrait constituer un facteur clé de la compétitivité des entreprises françaises en transformant les relations avec les clients, les fournisseurs et les autres partenaires, et en étant à l’origine d’une réorganisation des méthodes de conception et de production.

Comment la France peut devenir une grande terre d’innovation en médecine

A l’heure de la concurrence des start-up, des Gafa et de la mondialisation, les entreprises ont plus que jamais besoin d’expertise. Le principal frein à la transformation digitale dans les entreprises françaises est le manque de culture digitale et de formation. Les entreprises ont ainsi besoin de personnes à l’esprit vif, autonomes, aux qualités communicationnelles réelles et capables de comprendre rapidement une thématique ou des enjeux émergents.

Les succès de la Silicon Valley illustrent le potentiel des nouveaux modes d’innovation et de croissance économique. Dans ce « modèle », les liens entre universités et industrie constituent un élément central. Les innovations non technologiques en matière d’organisation ou de marketing peuvent intervenir dans des secteurs différents des innovations technologiques, mais peuvent aussi être complémentaires des innovations technologiques.

Dans cette équation complexe, les doctorants et les jeunes docteurs constituent les forces vives intellectuelles de la Nation , ils doivent être vus comme l’une des clefs qui doit permettre à la France de tenir son rang dans la compétition internationale. Comme le fait Okay Doc, il faut notamment multiplier les interventions croisées et les partenariats de professionnels de la recherche dans les entreprises et dans les universités.

Créer un environnement propice

Pour favoriser cette transition entre deux mondes et donner vie à de nouveaux futurs, il faut créer un environnement propice à l’innovation grâce à des personnes capables d’aller plus loin que ce qui était fait par le passé. Il ne s’agit plus d’améliorer l’existant ou de reproduire des schémas établis, mais d’en créer de nouveaux. On le voit particulièrement en Afrique , les télécoms sont un véritable catalyseur du développement économique. Ce continent qui avait beaucoup de retard est en train de sauter des étapes entières de développement, grâce à une stratégie ingénieuse de contournement. On peut notamment se passer d’une banque, quand le téléphone devient un moyen de paiement… Pour les entreprises, l’idée consiste à revenir à des produits plus efficaces qui répondent à des problématiques et à des besoins du quotidien quitte à se réinventer complètement ou à disparaître.

L’innovation numérique implique tout à la fois d’inventer de nouveaux modèles économiques, de repenser les modes de production, d’organisation, de collaboration et de distribution. En somme, une toute nouvelle société s’ouvre à nous.


Publié dans les Echos

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Erwann Tison est le directeur des études de l’Institut Sapiens. Macro-économiste de formation et diplômé de la faculté des sciences économiques et de gestion de Strasbourg, il intervient régulièrement dans les médias pour commenter les actualités liées au marché du travail, aux questions de formation et aux problématiques européennes. Il est également chargé de cours à la faculté d'économie de l'Université de Strasbourg. Il codirige également les observatoires "santé et innovation" et "emplois, formation et compétences" de l'Institut Sapiens. Il a publié « les robots, mon emploi et moi » (2019) et « un robot dans ma voiture » (2020) aux éditions ESKA.

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Erwann Tison est le directeur des études de l’Institut Sapiens. Macro-économiste de formation et diplômé de la faculté des sciences économiques et de gestion de Strasbourg, il intervient régulièrement dans les médias pour commenter les actualités liées au marché du travail, aux questions de formation et aux problématiques européennes. Il est également chargé de cours à la faculté d'économie de l'Université de Strasbourg. Il codirige également les observatoires "santé et innovation" et "emplois, formation et compétences" de l'Institut Sapiens. Il a publié « les robots, mon emploi et moi » (2019) et « un robot dans ma voiture » (2020) aux éditions ESKA.

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Erwann Tison est le directeur des études de l’Institut Sapiens. Macro-économiste de formation et diplômé de la faculté des sciences économiques et de gestion de Strasbourg, il intervient régulièrement dans les médias pour commenter les actualités liées au marché du travail, aux questions de formation et aux problématiques européennes. Il est également chargé de cours à la faculté d'économie de l'Université de Strasbourg. Il codirige également les observatoires "santé et innovation" et "emplois, formation et compétences" de l'Institut Sapiens. Il a publié « les robots, mon emploi et moi » (2019) et « un robot dans ma voiture » (2020) aux éditions ESKA.